Aubusson possède l'un des plus bel instrument du Limousin. L'orgue de l'Eglise Sainte Croix d'Aubusson a vu le jour en 1982 grâce au compositeur André Jorrand. L'instrument, créé par Gérald GUILLEMIN, présente la particularité de s'apparenter à l'école saxonne du début du XVIIIème siècle, en Allemagne orientale, dominée par l'esthétique du grand facteur d'orgues de ce pays, Gottfried Silbermann. L'orgue d'Aubusson comporte 27 jeux et 1800 tuyaux.

Aprés avoir pris connaissance de la fiche technique, découvrez les témoignages du créateur et du titulaire de l'instrument.

La Fiche Technique

GRAND ORGUE

OBERWERK
PEDALE
Quintaden
16
Germshorn
8
Subbas 16
Principal
8
Voce Humana
8
Octavbass 8
Rohrflöte
8
Gedackt
8
Octavbass 4
Quintaden
8
Rohrflöte
4
Posaunenbass 4
Octava
8
Nasard
2 2/3
Trompetenbass 8
Quinta
2 2/3
Octava
2
Cornet 2
Octava
2
Quinta
1 1/3
Mixture
V
Sifflot
I
Trompete
8
Sesquialtera
II
Spizflöte
4
Cimbel III
Bärpfeife 8

GERARD GUILLEMIN, facteur d'orgue

Gérald GUILLEMIN : Les années 70 voient la redécouverte des orgues anciens européens. La standardisation stylistique de nombre d'instruments construits après la guerre dans nos pays correspond à une étape logique et incontournable (les « progrès »…) mais les jeunes organistes et facteurs d'orgues veulent voir et entendre autre chose ! Ils sont stimulés par les enregistrements de Michel CHAPUIS, de Francis CHAPELET (entre autres…) et ils commencent à voyager hors des sentiers battus. J'ai 31 ans lorsque la commande de l'orgue aubussonnais se concrétise. Malgré un certain nombre de péripéties on peut affirmer, avec le recul nécessaire, qu'elle vient de la rencontre d'André Jorrand, organiste à Ste Croix et de Pierre Vidal, l'un de nos plus grands musiciens et spécialistes de Jean Sébastien Bach. Je pars alors avec Jean Charles Ablitzer de l'autre côté de ce « Rideau de Fer » qui n'existait pas du temps de Bach, afin de voir de près ces fameux Saxons et Thuringeois, de Gottfried Siberman, Tröst, Hildebrandt.. Le coup de grâce est immédiat et plus de vingt années plus tard, je ne renie pas cet amour. Celui-ci m'a évidemment influencé pour la réalisation de l'orgue d'Aubusson qui sera terminé en 1982 et qui, comme le souligne alors un journaliste creusois en titre de son article, représente « 18000 heures de travail et d'amour » pour le concepteur mais aussi pour ses cinq compagnons artisans de l'atelier qui vivent la même aventure ! Je n'ai pas cherché à réaliser un « simple » pastiche car de nombreux paramètres sont différents de ceux des « originaux » de l'ex DDR, et puis il y a deux siècles de recul et « d'évolution » (ou de régression ?) ainsi que ma propre sensibilité. J'ai simplement cherché à m'exprimer librement sur un thème donné, à insufler vie et chaleur ; plénitude et gravité à ce grand corps sonore, rejoignant un peu par la pensée ce début XVIIIe s. allemand qui me fascine tout autant que le XVIIe s. français ou italien et espagnol Année 2000, année Jean Sébastien Bach ! Plus que jamais, l'orgue est le porte parole de nos sentiments enfouis, il clame notre allégresse, crie notre détresse, appuie notre prière, porte nos espoirs ! Qui mieux que Jean Sébastien Bach finalement, a su faire ce lien, au travers de sa musique et de son instrument entre le Créateur et Nous ?

ALAIN SANTONI, titulaire de l'orgue d'Aubusson

Alain SANTONI : Depuis 1983 je suis titulaire des orgues Guillemin d'Aubusson et je pense être sans orgueil déplacé, le plus souvent en contact avec cet instrument. Je joue les messes, les services et quelquefois je donne des concerts. Pourtant cet orgue baroque allemand n'a pas toujours été mon ami, loin s'en faut. Habitué à toucher les orgues néo-classique de Montluçon, de Moulins, etc… je le trouvais mauvais accompagnateur, car trop maigre, trop crillard et aussi sans relief, enfin surtout trop vert (trop neuf). Malgré tout c'est lui qui a eu raison de moi. Rapidement une osmose s'est produite entre nous, je voulais comme l'avait dit un ancien professeur de ma jeunesse, dominer l'instrument, c'était, à mon avis, la seule manière de ne pas en avoir peur, mais ce ne fut pas une tâche aisée. Tous les soirs, ou presque, par n'importe quel temps, et Dieu sait si les hivers sont froids à Aubusson, je me suis installé à la console et j'ai travaillé des œuvres de J.S. BACH, BUXTEHUDE, etc… J'ai travaillé ma technique et achevé de connaître les possibilités de registrations offertes par ce Pape des Instruments. Les défauts que je reprochais à l'orgue, il y a 18 ans, sont devenus des qualités. La clarté de ses fonds, la beauté de ses jeux de détail et les couleurs de ses anches m'ont fait regarder les instruments Bourbonnais avec un autre œil. Et puis, tous les ans, c'est l'apothéose avec le stage d'orgue et les concerts. Maintenant, je n'ai aucun regret à prêter les claviers, n'éprouvant aucune jalousie vis à vis de ceux qui sont professionnels en la matière, mais en plus je suis extrêment heureux d'entendre d'autres manières de toucher, d'autres œuvres et d'autres passionnés de celui que j'appelle l'instrument complet et surtout qui fait ressentir un plaisir mythique. Je ne regrette en aucun cas d'avoir choisi l'orgue et je suis fier de pouvoir disposer de celui d'Aubusson à tout moment.