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La trangénèse et les OGM ( organismes génétiquement modifiés).
Janvier 1999

Francis Duchiron

Introduction
Alors que se développe le débat sur l'acceptation des OGM (Organismes génétiquement Modifiés), il apparaît que certains des acteurs de ce débat ignorent ce qui se cache derrière ce terme. Pour moi beaucoup des problèmes et questions posées proviennent de la méconnaissance de ce sujet et donc de la peur qu'engendre toujours l'inconnu. Je vais essayer de préciser les différents axes et thématiques que l'utilisation de ces techniques impliquent, ainsi que leurs conséquences prévisibles au plan médical, agro-alimentaire et environnemental.


Définition
Qu'est ce que la transgénèse ? Il s'agit de la possibilité de faire exprimer une partie du patrimoine génétique d'un organisme (qualifié d'organisme donneur) par un autre organisme d'une espèce différente (organisme hôte). Cette technique permet donc des échanges génétiques entre des espèces que l'évolution a séparées. Ce point, qui est souvent présenté sommairement est à nuancer fortement. En effet la transgénèse ne génère pas d'hybrides contre nature, ceux-ci ne seraient de toute façon pas viables ; il s'agit de transfert limité d'un ou tout au plus de quelques éléments génétiques qui vont entraîner la modification de quelques aspects limités de l'hôte. Or ce type de transfert interspécifique existe dans la nature via certains virus (le virus de la grippe est ainsi susceptible de faire passer du matériel génétique entre les oiseaux, les porcs et les primates (dont l'homme).


Comment ça marche
La transgénèse n'est possible que parce que l'ensemble des êtres vivants (au moins sur la planète Terre) parle la même langue au sens génétique. Jacques Monod disait " ce qui est vrai pour le colibacille est vrai pour l'éléphant " ; le code génétique est universel et commun (il y a bien quelques petites variantes, mais pour rester dans l'analogie linguistique ce sont des accents comme l'accent québécois, marseillais ou parisien, il y a des différences mais tout le monde se comprend). Ceci implique que si vous donnez à lire à un colibacille un morceau du patrimoine génétique de l'éléphant il est capable de le lire, de le comprendre, et donc d'effectuer les instructions qu'indiquent ce fragment. Mais vous allez me dire que dans la nature cela ne se produit jamais ! Ce n'est pas si évident. Il y a des colibacilles parmi la flore digestive de l'éléphant et il semble bien que certains échanges aient lieu de manière naturelle avec des fréquences extrêmement basses:10 puissance-12 ou moins, ( il n'y a pas 10 puissance12 éléphants sur terre (çà se saurait) mais 10 puissance12 est à peu près le nombre de micro-organismes par gramme de contenu intestinal).

 

Un peu d'histoire
C'est au début des années 1970 que les premières expériences de transgénèse ont été réalisées chez le colibacille par 3 chercheurs, 2 américains (Boyer et Cohen), et un français (Rambach, élève de Monod à Pasteur). Ces chercheurs ont pour la première fois réussi à faire exprimer dans le colibacille un gène c'est-à-dire une séquence d'ADN (acide désoxyribonucléique) provenant d'un autre micro-organisme. Ce type d'expériences s'est très vite généralisé et est devenu un outil classique d'étude du monde microbien et au plan appliqué pour transformer les microbes en usines à molécules. Mais dès cette époque les chercheurs ont pris conscience de ce qu'ils faisaient et en 1973 était décrété un moratoire sur ces expériences lors de la conférence d'Azilomar, afin d'établir des règles d'éthiques. C'est à la suite de ce moratoire qu'on été définies les règles actuelles pour ce type de travaux, et il est important de le signaler, à la seule initiative des chercheurs qui ont demandé qu'on leur impose des règles à respecter. Ce moratoire a duré 6 mois et très vite les techniques se sont perfectionnées et ont permis la transgénèse de la totalité des espèces vivantes.

 

Un peu de technique
Pour réaliser une transgénèse plusieurs conditions sont nécessaires :

1/ disposer d'un ADN donneur
La première étape consiste à préparer l'ADN, pour cela par des techniques assez simples on extrait l'ADN de la cellule qui contient l'information désirée. Si extraire l'ADN total d'une cellule est relativement simple, identifier le fragment (gène) qui porte l'information recherchée est toujours plus délicat. Aussi la première étape consiste à réaliser ce que l'on appelle une banque de gènes. Pour cela on introduit l'ADN extrait par petits morceaux dans des cellules bactériennes (le plus souvent le colibacille), et ensuite on teste ces cellules une à une afin de déterminer la bonne cellule, c'est-à-dire celle qui contient le gène désiré. Pour cela diverses techniques de criblages existent, et il est courant de cribler plusieurs milliers de clones avant de trouver le bon. Les firmes spécialisées considèrent un délai de 3 semaines comme raisonnable pour trouver le bon gène en absence de problème particulier (certains gènes sont beaucoup plus longs à obtenir). Le clone (nom donné à la cellule bactérienne (ou autre) isolée après criblage) contenant le gène identifié, il est alors très aisé d'en extraire le gène, de le purifier, et éventuellement le modifier pour qu'il puisse s'exprimer correctement (corriger les différences d'accents pour revenir à la comparaison linguistique).

2/ choisir un hôte
C'est-à-dire définir le type d'organisme dans lequel on souhaite faire exprimer ce gène. Une plante, un animal, une bactérie, un champignon, en fait n'importe quel type de cellules vivantes peut servir d'hôte. Il n'existe plus aujourd'hui d'organismes ou cette technique ne soit pas possible. Le choix ne dépend que des contraintes lié à l'objectif recherché. Pour la production de molécules d'intérêt la cellule hôte est le plus souvent une bactérie ou un champignon unicellulaire comme la levure de boulangerie. Il est ensuite très aisé de cultiver cet organisme dans de grandes cuves spécialisées (appelées fermenteurs) et d'en extraire le produit désiré. Mais l'hôte peut être un organisme plus complexe, plante ou animal supérieur, homme compris (cas de la thérapie génique). Dans le cas des organismes supérieurs on distingue deux types de transgénèse , la transgénèse somatique quand le gène est introduit dans des cellules différenciées et la transgénèse germinale quand le gène est introduit dans les cellules sexuelles (pollen, ovule) ou dans l'œuf après la fécondation et avant la première division cellulaire. La conséquence de ces deux types différents est que la transgénèse somatique ne concerne qu'un seul individu et n'est pas transmissible à la descendance de l'individu. Au contraire de la transgénèse germinale qui est elle héréditaire et est transmise à la descendance en suivant les lois de Mendel. La thérapie génique chez l'homme est une transgénèse somatique alors que le maïs de Novartis est une transgénèse germinale.

3/ introduire le gène dans le génome de l'hôte
Pour cela il faut disposer de ce que l'on appelle en jargon scientifique d'une technique de transformation. C'est l'étape la plus délicate du système . S'il n'y a pas de problème particulier pour les bactéries (il existe un état physiologique naturel appelée état de compétence ou la bactérie est naturellement capable d'incorporer de l'ADN exogène), pour les cellules dites eucaryotes (champignons, plantes animaux), c'est un peu plus compliqué.

Animaux. Paradoxalement c'est pour la transgénèse germinale des animaux que c'est le plus facile, on procède simplement par microinjection directe dans l'œuf à l'aide d'une microseringue, injection réalisée grâce à un micromanipulateur sous microscope. L'œuf est introduit ensuite chez une mère (au sens femelle de l'animal hôte) porteuse pour un développement normal. La transgénèse somatique est par contre particulièrement difficile, elle nécessite des outils supplémentaires appelés vecteurs, ceux qui sont actuellement les plus utilisés sont des virus modifiés (rappelez-vous que les virus sont des agents naturels de transgénèse spontanée), les plus utilisés dérivent des nombreux virus causant les classiques rhumes. Mais il faut reconnaître que les vecteurs actuels ne sont pas très performant. A côté des expériences sur des animaux entiers, il est aussi possible de transformer des cultures de cellules animales (aussi simple que les bactéries). Ces cellules peuvent être mises en culture pour certains cas particuliers (pour produire certains médicaments ou dans certaines thérapies géniques où l'on prélève des cellules au malades que l'on transforme, cultive et réintroduit ensuite au malade).
 
Plantes. On ne pratique que la transgénèse germinale, mais avec des variantes. En effet les plantes présentent une propriété particulière à savoir que pour la plupart des plantes on est aujourd'hui capable de régénérer un individu complet à partir de cellules en culture. Aussi il suffit de transformer des cellules végétales et ensuite de régénérer la plante pour avoir une transformation de type germinale, la plante régénérée transmettant les caractères à sa descendance. La transformation des cellules végétales est par contre relativement complexe et beaucoup plus difficile que celle des cellules animales ou bactériennes. La technique la plus utilisée aujourd'hui est celle de la biolistique. Technique qui consiste à adsorber l'ADN sur des microbilles d'or et ensuite d'introduire ces microbilles dans la cellule par projection violente sur celle-ci, la cellule va alors incorporer l'ADN et se diviser, on a alors en culture des cellules végétales transformées. Elles peuvent être utilisées telles quelles ou passer dans le cycle de régénérescence pour redonner la plante complète.    

Ou sont les contraintes : techniques, financière ou autres
Les contraintes techniques sont aujourd'hui très faibles voir quasi nulles. Construire des micoorganismes, plantes ou animaux transgéniques, est aujourd'hui à la portée de n'importe quel laboratoire de microbiologie (pour les microbes), de physiologie végétale (pour les plantes) ou de physiologie animale (pour les animaux). L'équipement pour ce type d'expérience est relativement simple et peut être acheté par n'importe quelle société de ce domaine y compris les PME. C'est pour cela qu'il existe beaucoup de PME (startup) dans ce domaine surtout aux USA mais aussi en Europe. Les contraintes financières les plus élevées viennent non pas des techniques de transgénèse elle-même, mais du respect des normes fixées dans les différents pays pour éviter d'une part le risque de dissémination accidentel des organismes modifiés et le risque pour l'expérimentateur (la recherche utilise ces techniques sur de nombreuses maladies). Si ces contraintes sont plutôt bien respectées dans les pays industrialisés (USA, Europe , Japon), on ne sait pas si c'est le cas dans les autres pays utilisant cette technologie (Chine, Inde, Pakistan, Brésil, Argentine, pour ceux dont on connaît quelque chose). A titre indicatif rien qu'en France il existe déjà plusieurs milliers de techniciens maîtrisant parfaitement ces technologies. Certaines expériences sont même réalisées au lycée aujourd'hui dans les disciplines biologiques des lycées techniques (préparation au BTS).

 

Que fait on de cette technique
Il y a deux grands domaines d'utilisation : santé et agro-alimentaire.

1/ domaine de la santé
Toutes les protéines d'origine humaine d'intérêt thérapeutique (hormones, interférons, cytokines, facteur de coagulation …) sont dès aujourd'hui totalement produites par des organismes transgéniques, soit des bactéries (cas de l'insuline) soit des cellules en culture (certaines hormones), soit dans le lait d'animaux transgéniques (facteur 8 et facteur 9 pour les hémophiles, produit par des brebis et des chèvres transgéniques). L'utilisation de cette technique est un grand progrès en terme de santé car les produits obtenus de cette manière sont d'une qualité bien meilleure, si en 1984 la production des facteurs 8 et 9 (par transgénèse) pour les hémophiles avait été au point, il n'y aurait eu aucun cas de sida chez les hémophiles, car les produits de la transgénèse sont totalement exempts de virus ce qui n'est pas le cas des produits d'extraction humains (nous sommes tous des porteurs sains pour certains virus !), de même il n'y aurait pas eu de cas de Creutzfeld Jacob chez les enfants traités à l'hormone de croissance. A côté de ces produits pharmaceutiques, il y a aussi les vaccins, y compris ceux pour les maladies infectieuses classiques. La plupart des vaccins sont produits aujourd'hui par des micro-organismes transgéniques. Il faut signaler que c'est un vaccin qui a été le premier système transgénique diffusé à grande échelle dans la nature. Vous avez tous entendu parler de la campagne de vaccination contre la rage des renards sauvages. Cela a été réalisé en larguant dans les zones de la pandémie rabique des doses de vaccins (dissimulés dans des appâts) obtenus par technique de transgénèse (préparé par la société Pasteur Mérieux). A côté de ces produits se développe ce que l'on appelle la thérapie génique en santé humaine. Cela consiste à injecter un ADN dans les cellules de malades, cela s'applique évidemment à l'ensemble des maladies génétiques (plus de 3000 connues à ce jour, dont les plus fréquentes sont en France la mucoviscidose et les myopathies) mais aussi au traitement de certains cancers et éventuellement de certaines maladies infectieuses comme le sida (où des pistes intéressantes sont en cours d'exploration). Il s'agit dans ce cas de transgénèse somatique . Aucun de ces traitements n'est encore opérationel, les plus avancés en sont au stade des essais cliniques. Si sur le papier il s'agit effectivement du remède idéal pour ces maladies, la réalisation pratique est plus complexe, car il s'agit d'introduire le fragment d'ADN non plus dans une cellule (transgénèse germinale) mais dans les milliards de cellules du tissu à soigner chez l'individu malade. Toute la difficulté réside dans le vecteur chargé de transporter l'ADN dans les bonnes cellules. Comme il semble utopique (en l'état actuel) de réussir à transformer l'ensemble des cellules concernées, il est probable que le traitement sera chronique pour les malades. Il faut savoir qu'il n'est pas nécessaire que toutes les cellules soient saines pour que les symptômes de la maladies disparaissent, un certain pourcentage de cellules saines est souvent suffisant, par exemple dans le cas de l'anémie falciforme, maladie génétique héréditaire des globules rouges dont les deux allèles sont codominant (allèle normale et allèle malade " muté "), il existe donc 3 type chez les porteurs ceux qui n'ont qu'un seul type d'allèle, 100% normal ou 100% muté et ceux qui sont à 50/50, or ces derniers sont tout à fait normaux sans aucun symptôme de la maladie (ils sont même naturellement résistant au paludisme). La thérapie génique est donc une voie très prometteuse pour toutes ces maladies, et dans ce cas personne ne la conteste bien qu'il s'agisse de transgénèse humaine. De plus il faut savoir que se prépare le thérapie génique germinale, dont les caractères seront transmissibles à la descendance, elle est plus simple que la somatique. Et il y a pour cela une demande forte des malades qui ne veulent pas voir leurs enfants atteints de la même maladie qu'eux.


2/ domaine agro-alimentaire
C'est le deuxième grand domaine d'utilisation de la transgénèse. Au sein de ce domaine on peu distinguer deux sous-domaines, celui des additifs produits par des organismes transgéniques et celui des organismes transgéniques eux-mêmes destinés à l'alimentation.    

Cas des additifs : ces produits ne posent pas de controverse pour le moment (peut-être par pur ignorance de leur existence). On trouve parmi eux essentiellement les enzymes utilisées comme auxiliaires technologiques dans de nombreux procédés agro-alimentaires. Citons comme exemple les 3 enzymes nécessaire à la transformation de l'amidon en glucose (il se produit ainsi environ 30 millions de tonnes de glucose par an au niveau mondial, dont la moitié est utilisée par l'industrie agro-alimentaire). Ces enzymes sont aujourd'hui entièrement produites par des micro-organismes transgéniques. Il en est de même pour certains autres additifs comme certains acides aminés (cas de la thréonine) ou de certaines vitamines (cas de la B12). Si cette production ne pose pas de problème c'est que le produit fini ne contient pas de transgène, de ce fait il n'y a aucune différence entre le produit fini classique et celui obtenu à l'aide d'outil transgénique, du glucose est toujours uniquement du glucose quelle que soit sa méthode d'obtention. Il existe quelques cas plus discutés : c'est lorsque l'additif " transgénique " est susceptible de se retrouver dans le produit fini, c'est le cas pour certaines enzymes comme la présure utilisée en fromagerie par exemple, et qui se retrouve dans le fromage terminé.  
 
Cas des aliments transgéniques : il s'agit des plantes et animaux transgéniques destinés à la consommation humaine (les fameuses OGM). Je parlerai surtout des plantes car pour le moment il n'existe pas encore d'animaux transgéniques destinés à la consommation humaine (il y a bien eu une tentative de porc transgénique en Australie, mais elle est restée sans suite). Le seul domaine ou il pourrait y avoir des animaux transgéniques rapidement est celui de l'élevage laitier. On peut penser par exemple que des vaches exprimant le gène de la BST (hormone de la lactation) pourraient remplacer avantageusement les injections de cette hormone (obtenu par des bactéries transgéniques) telles qu'elles sont effectués aujourd'hui (aux USA uniquement, ou cette pratique est courante), de telles vaches existent probablement déjà dans les fermes laboratoire de Monsanto (la firme qui produit déjà la BST). Que peut-on faire comme plante transgénique ? j'aurais tendance à répondre Tout.
 
Quelle sont les cibles actuelles ?
Il y a principalement deux types de cibles recherchées : la résistance aux maladies et aux insectes. La résistance aux maladies. Les plantes aussi ont leur propre système " immunitaire " de défense vis-à-vis des maladies qui leurs sont spécifiques et il est possible par les techniques de transgénèse de les rendre résistantes à des infection virales, bactériennes ou fongiques, c'est le cas pour des variétés de riz déjà cultivé en Extrême-Orient. L'intérêt de ce type de transgénèse est évident, la plante étant naturellement résistante n'est plus malade (au moins pour une maladie), ce qui entraîne deux choses : d'une part un meilleur rendement (il n'y a plus de perte liée à la maladie) et aussi une diminution des traitements car il n'est plus nécessaire de faire des traitements préventifs ou curatif sur le champ. Quel intérêt pour le consommateur ? c'est plus difficile à cerner car la plante présente les mêmes propriétés que la plante non transgénique mais elle contient un gène supplémentaire et donc au moins une protéine supplémentaire qui sera consommée. Il faut donc connaître l'incidence de cette protéine sur l'homme qui la consomme. Dans le cas des résistances aux maladies les stratégies choisies sont selon moi totalement sans danger pour le consommateur. En effet le plus souvent il s'agit de faire produire par la plante une protéine de l'organisme phytopathogène qui sert d'inducteur aux systèmes de défenses naturels de la plante. Or dans les champs de plantes non transgéniques même traitées il existe toujours un taux résiduel non nul de plantes malades qu'il est impossible de séparer des plantes saines, ce qui signifie que depuis toujours (depuis que l'homme consomme ces plantes) il consomme régulièrement des protéines de l'organisme phytopathogène, donc celles qui sont produites directement dans les plantes ne sont pas plus gênantes que celles qui viennent de la maladie elle-même. La résistance aux insectes. Dans une démarche de même type, les semenciers construisent des plantes résistantes aux insectes ravageurs. C'est le cas du maïs Novartis résistant à la pyrale. Pour cela ils ont introduit dans le maïs le gêne d'une toxine insecticide d'origine bactérienne, ce qui entraîne la production de cette toxine dans le maïs et lorsque la pyrale commence à attaquer la plante elle est tuée par la toxine. Cette toxine étant présente dans la plante elle sera consommé par l'homme. Quelle est son incidence, car là il n'y en pas dans les plantes non transgéniques. Cette toxine est connue depuis très longtemps et est largement utilisée en traitement curatif des cultures de maïs classique, elle est étudiée depuis longtemps et est considérée comme totalement non toxique pour l'homme (autrement elle n'aurait pas pu être autorisée en traitement curatif). Par contre il existe un risque environnemental, car en effet cette toxine est normalement rapidement dégradée dans le sol lorsqu'elle est ajoutée sur le champ, mais là elle est produite en continu par le maïs donc continuellement présente, cela peut avoir plusieurs types d'incidence : entraîner une surmortalité des lépidoptères (insectes cibles de cette toxine) et d'autre part favoriser l'émergence de souches de pyrale résistantes donc qu'il sera beaucoup plus difficile à contrôler y compris pour les cultures non transgéniques. Par ailleurs la plupart des plantes transgéniques actuelles contiennent un gêne de résistance à un antibiotique, cela n'a aucune utilité pour la plante elle-même, ce n'est qu'un résidu des méthodes qui ont servi à produire la plante transgénique. Ce problème est en passe d'être résolu. On en parle aujourd'hui car arrivent sur le marché les premières générations de plantes transgéniques qui ont été mises au point il y a 10 ans (compte tenu des délais d'autorisation qui sont très long). Or, les techniques ont fait des progrès et les nouvelles générations de plantes transgéniques qui vont arriver sur le marché sont totalement dépourvues de ce type de gènes. Enfin dernier type de plantes actuellement disponibles, celles possédant un gène de résistance à un herbicide. C'est probablement, selon moi, les plus gênantes (pour faire un mauvais jeu de mot). L'intérêt est évident pour l'agriculteur. Il peut traiter son champ avec l'herbicide, seuls ses semis transgéniques pourront pousser, il aura donc un meilleur rendement puisqu'il n'y a plus aucune compétition avec les plantes de l'environnement qui sont détruites. Quel est le risque ? Il est à nouveau principalement environnemental, puisqu'il va y avoir une pression de sélection pour favoriser l'apparition de plantes résistantes à l'herbicide. Mais de plus comme l'on reste au sein du monde végétal il peut y avoir des transferts horizontaux de gènes. C'est-à-dire des croisements entre les plantes transgéniques et les plantes sauvages apparentées. S'il n'y a pas trop de risque avec le maïs en France (pas de maïs sauvage chez nous), il n'en est pas de même avec le colza ou la betterave pour lesquelles il existe des variétés sauvages capables de se croiser avec les plantes transgéniques, donc d'acquérir par croisement le gène de résistance et devenir elles-mêmes résistantes, et de ce fait incontrôlables puisque l'herbicide n'aura plus d'action. De plus les plantes transgéniques peuvent devenir elles-mêmes des " mauvaises herbes " pour d'autres cultures.


Que doit en attendre ?
Dans le domaine santé c'est clair que c'est extrêmement intéressant puisque cela apporte des solutions à des problèmes qui n'en n'ont pas actuellement.   Pour le domaine agro-alimentaire, c'est plus discutable, car l'avantage est surtout une augmentation de rendement, et en période de surproduction est-ce vraiment utile ? la question peut légitimement être posée. Ces techniques entraînent une réduction des coûts de production pour l'agriculteur et pour la firme productrice de semences. Pour que cela soit admissible par le consommateur il faut que le gain que cela apporte en terme économique soit partagé, donc qu'il y ait une baisse des prix à la consommation. On peut aussi avoir un gain écologique avec les plantes résistantes aux maladies car cela diminuera les produits chimiques nécessaires pour la bonne santé des cultures. Ceci est vrai pour les pays industrialisés, par contre pour les pays en développement la problématique est différente, car ces pays sont loin d'avoir atteint l'autosuffisance alimentaire et pour eux tout ce qui peut augmenter la production est bon à prendre et les plantes transgéniques risquent de devenir rapidement la norme agricole. Ainsi les surfaces cultivées en riz transgénique en Chine, bien que non connues avec exactitude, sont probablement très importantes, et si ces cultures donnent satisfaction dans un délai relativement court (5 à 10 ans) il est probable que la totalité des cultures de riz en Extrême-Orient se fera avec des variétés transgéniques.

Pour conclure
Pour conclure La transgénèse est arrivée à un tel stade de développement qu'il est devenu quasi impossible de l'empêcher : c'est facile, techniquement relativement bon marché à réaliser, et présentant des intérêts économiques. Dans la société libérale qui est la nôtre (qu'on le veuille ou non, il faut constater que c'est la réalité), il y a tous les ingrédients pour que cela continue de se développer. Comme les scientifiques et les firmes sont (quand même) plutôt respectueux de la loi, il faut canaliser ce développement de manière à d'une part minimiser les risques (le risque zéro n'existant pas) et d'autre part informer le consommateur, de manière à ce qu'il puisse choisir ce qu'il mange en toute connaissance, pour ce qui est des applications agro-alimentaires. Les applications dans le secteur santé étant, elles, non contestables. J'espère que cet exposé, encore trop long quoique très succinct, vous aura permis de vous faire une idée sur les OGM et les manipulations génétiques.




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